Vœux. « Il ne faut pas craindre de courir à l’inverse de la marée montante, il faut brûler en effigie nos propres caricatures »
JCC
Il y a un peu plus d’un an, un peu plus d’un an de lectures, de discussions, de voyages, d’écrits, de rêves nous vous présentions le blog D.É.L.I.É.E, projet de nature littéraire et artistique, espace de réflexions et de critiques autour des livres de fiction et de non fiction, des mots, des êtres et des actualités du monde.
Le 12 décembre 2017, nous vous faisions part de l’intention d’écrire sur ce qui nous inspire, nous touche, de notre désir et notre « besoin » de dire, de participer à ce qui s’apparente aussi comme une « contre-expérience littéraire ».
Comment décrire cela ?
Il ne s’agit pas pour nous « d’aller toujours à l’encontre de » pour simplement « aller à l’encontre de ». Non, on veut bousculer intelligemment. Faire résonner furieusement.
Cette contre-expérience littéraire se fonde sur les nombreuses possibilités qui existent pour aller chercher l’essentiel dans un roman, un conte, une nouvelle, un poème ou une pièce de théâtre. Cette contre-expérience littéraire, on la voit dans notre façon de quêter d’autres sens, d’autres formes, d’autres visions du monde et des littératures. Littératures, au sens de sensibilités, d’espaces nouveaux qui s’ouvrent à nous, de mystères.
Tenter de raconter à notre manière une histoire critique de nos lectures, faire ressentir la puissance d’auteurs lus ou peu lus. Laisser notre esprit gambader sur les chemins d’infortune de l’actualité sensible, penser les différentes façons de révéler ce qui façonne et nous façonne dans un monde où l’urgence identitaire a pris le dessus sur l’idée d’humanité. Créer. Quelque chose. Toutes ces actions sont ce qui nous animent dans cette aventure exigeante, cette belle aventure à la fois personnelle et collective.
Des premiers textes ont jailli. Ils ont porté sur des thématiques qui ces derniers temps ont occupé les esprits, sur des questions peu ou longuement débattues, des sujets en ébullition, embarqués. Nos écrits ont quelque part reflété nos propres états lors d’une année toute drôle, révélatrice d’un certain nombre de choses, d’une année chaotique et dangereuse, belle et triste, puissante et fragile.
Des proses rebelles, sans concession
Pourquoi faire se rencontrer Toni Morrison et Elena Ferrante sur la question des femmes, du féminisme ? Qu’est-ce qui dans My Mother was a Freedom fighter de la poétesse Aja Monet fait résonner le long combat de mères, de filles, de sœurs en proie à la violence d’un monde qui n’épargne pas ? Pourquoi partir « à la recherche de Jean-Claude Charles » telles des enquêtrices de proses rebelles, sans concession ? Les livres de l’écrivain et journaliste occupent une grande place ici. Nos premiers vœux pour cette année est de faire entrer ce « nègre errant » dans vos vies. De vous faire découvrir à nouveau Manhattan blues, de si jolies petites plages, Le corps noir, Négociations ou Bamboola Bamboche.
Jean-Claude Charles fait partie de cette trempe d’auteurs « qu’il faut avoir lu » dans sa vie. Nous aurons l’occasion d’écrire à nouveau sur cet homme de lettres mystérieux, sur ses romans, ses essais, ses autres textes. Nous vous ferons entendre encore et encore ses mots libres, non tenus en laisse dans une « suite » prochaine en plusieurs formes de ce projet qu’on porte et qui nous tient.
L’Imaginaire des Autres
« Elles se mirent à parler tant elles étaient pleine du besoin de dire ».
On a fait nôtre cette réflexion tirée du roman Sula de Toni Morrison. Le besoin de dire a été l’une des raisons d’être de ce blog. Dire, c’est laisser partir la parole, expulser le silence de nos ventres, imposer un nouvel imaginaire. Celui de ceux qu’on a désigné comme « Autres », pour reprendre la pensée de notre Guerrier de l’Imaginaire sur D.É.L.I.É.E, GDL.
Dans sa rubrique intitulée GDL, il chronique non sans ironie et fantaisie, cette rencontre entre l’Autre et sa propre aliénation, cette difficile cohabitation entre l’Autre et ce monde qui l’a construit. GDL prend le pouls du temps aussi. Dans Bonjour colère ou l’époque des passions tristes, le chroniqueur propose un dialogue autour de sujets qui font bouillir l’espace médiatique, les faisant s’entrechoquer, se mêler pour mieux en saisir la complexité, leur pendant fictionnel. De la victoire de Bolsonaro au Brésil en passant par les liens entre Kanye West et Trump, ou encore la question des migrants, GDL pointe sa plume dans les maux d’une époque « triste », « en colère ». Il récuse. Tout le monde ne peut être innocent, tout le monde ne peut être coupable.
Et pour affiner cette ambition de tâter l’espace-monde à travers les mots, on a créé la rubrique Les Mondains consacrée à l’exploration des discours de Prix Nobel de littérature. En quoi l’analyse du discours d’un récipiendaire du prix Nobel de littérature à l’instar de Wole Soyinka peut-il éclairer sur la voix (politique) de l’écrivain qui témoigne des fureurs d’une époque ?
Dans Son passé parle à son présent, un discours fort prononcé à Stockholm en 1986, l’auteur nigérian fait le procès de la communauté des hommes. Consacré à Nelson Mandela et à l’apartheid qui sévit en Afrique du Sud, le discours interroge l’histoire, son présent qui n’a tiré aucune leçon du passé. Wole Soyinka dénonce le racisme, les exactions de l’homme blanc sur les peuples noirs.
« Jamais la race noire n’a essayé d’assujettir ou de convertir autrui par la force, animée d’un zèle évangélisateur reposant sur la conviction de détenir la vérité suprême. La guerre pour des raisons économiques et politiques, certes ! mais jamais pour des motifs religieux. »
Le Prochain auteur à figurer dans notre rubrique Les Mondains sera William Faulkner.
Encore plus d’histoires
Pour 2019, on souhaite continuer à vous raconter des histoires qui saisissent, à vous interpeller avec nos mots, nos émotions, nos sensibilités liées et déliées. On souhaite continuer à vous faire découvrir ou (re)découvrir des auteurs, des artistes, d’autres pensées, d’autres âmes littéraires, insubordonnées, magiques, investies.
Après Patrick de Lassagne, Faïza Guène, Audrée Wilhelmy, on a discuté avec un auteur qui a commencé à écrire grâce à la musique. D’autres dialogues suivront. Ils seront longs, fouillés, audacieux. Nos prochains écrits, vous le verrez parleront de plus en plus de voyages. On mettra (enfin) un point final au premier « volet » des textes de la rubrique New Orleans In My Genes. Cette année, nous avons encore tant à dire… tant à inventer…
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